Itxassou : la querelle de voisinage se finit en prison.
Yannick a-t-il conscience de la gravité de ses actes ? « Oui », répond le prévenu de 43 ans, à la barre du tribunal judiciaire de Bayonne, lundi 3 janvier. « Les regrettez-vous ? », interroge la présidente, Anne Chaussier-Mackowiak. « En partie seulement. » Il estime avoir été poussé à bout par sa voisine du dessus, dans la maison divisée en deux appartements où ils vivent, à Itxassou. Au point de la menacer d’un fusil. Puis d’asperger d’essence sa voiture, les abords du bâtiment et faire mine de les incendier.
Le 16 avril 2020, vers 19 heures, Anne partage un apéritif avec un ami, sur sa terrasse. Yannick décrit le bruit qui l’excède, une énième fois. Il sort avec une arme, épaule vers sa voisine. Elle filme la scène avec son téléphone : « On vous voit la viser depuis le bas de l’escalier », décrit la présidente. Il appuie sur la détente : « Clic. » L’arme n’est pas chargée. « Je le savais », soutient Yannick. « Je n’aurais pas dû le faire. C’est extrême. » Les gendarmes découvrent les protagonistes tous avinés. Plus de 2 grammes pour Yannick.
« C’est idiot »
Ce n’est pas la première fois que les militaires s’interposent. C’est même une habitude, depuis leur installation, voilà un an. Il lui reproche du tapage récurrent, l’accuse de deal. Il y a aussi les animaux de Yannick qu’elle tenterait d’empoisonner ou de blesser avec « du verre pilé ». Le procureur, Marc Mariée, s’étonne : « Vous qui êtes si prompt à appeler les gendarmes, vous ne l’avez jamais fait pour vos animaux… »
Anne a filmé une autre séquence rageuse de son voisin. Le 30 décembre 2021, il répand de l’essence sur la terrasse de la maison et la voiture de la victime. Il enflamme la première flaque. « C’était sur du béton, ça a brûlé dix secondes », se défend le prévenu. Son avocate, Martine Voirin Havez relève qu’« il n’a pas tenté d’enflammer la voiture ». Ce qu’il a fait est « idiot », Yannick le sait. « Pourquoi l’avoir fait ? », tente Anne Chaussier-Mackowiak. « Pour les animaux, le poison, le bordel… » Yannick est encore passablement alcoolisé.
« Il ne fait pas bon être le voisin de Monsieur », ironise Marc Mariée. Le ministère public pointe un comportement « obsessionnel » et taille en pièces l’hypothèse de l’homme épuisé par une voisine infernale : de la « littérature ». Le magistrat décrit un homme « intrinsèquement violent ». Il rappelle les huit condamnations à son casier, dont une pour violences volontaires.
Incident
Sur son banc, le prévenu ne porte plus son masque anti-covid. Marc Mariée s’interrompt : « Remettez-le. » « Il est cassé ! » Yannick se lève dans un mouvement d’humeur qui précipite son escorte auprès de lui. Il quitte l’audience en grondant. « Cette réaction nous permet de mesurer la violence intrinsèque de Monsieur », reprend le représentant du parquet. Il requerra deux ans de prison ferme et le maintien en détention.
« Je suis abasourdie par les réquisitions », se lance Me Voirin Havez. Pour elle, son client relève de l’hôpital psychiatrique, pas de la prison. Elle reprend les « éléments de personnalité » d’un homme par deux fois victime d’un traumatisme crânien. L’un lui a causé trois mois de coma. « Ces traumas lui ont laissé des séquelles qui expliquent en grande partie son manque de contrôle. » Et puis il tenterait de soigner son alcoolisme.
Le tribunal le condamnera à 7 mois de prison ferme, avec maintien en détention.
Pierre Penin
sudouest.fr